Lui, elle, eux.
Je suis en colère. Pour être plus précise, c'est une tristesse que je ne parviens pas à exprimer autrement que par de la colère. Je devais me réjouir d'aller les accueillir à l'aéroport, de les ramener chez eux, de passer la soirée avec eux. Mais non. Ca commence par un mensonge "ton papy est très pressé d'aller à la toilette, on revient vite". 20 (!) minutes plus tard, les revoilà. *haut-le-coeur* Je dis : "Mais ça pue le vomi, il a vomi? ". Ma grand-mère : "Oui, un peu, tu sais, l'avion ne lui réussit pas, on a été nettoyer tout ça". (mais putain, pourquoi me mentir !!!)
Toute sa vie est jonchée de mensonges, de "pieux" mensonges comme les nomme maman qui en a beaucoup souffert. Elle ne se rend pas compte du mal que a pu provoquer, elle pense, je crois, protéger ses proches en quelque sorte. Comme elle lui a allégrement menti pendant des années au sujet de ma maladie ! Attention, surtout ne pas lui dire, il pourrait retomber en dépression... Parce que papy, il vit dans son monde. Dans son monde, y a mamy et sans mamy, il n'est rien. C'est un bébé, incapable de faire quoi que ce soit par lui-même. Mamy est à son service, pourquoi changerait-il donc? Si son petit monde venait à changer, dieu sait ce qu'il adviendrait de lui !
Moi qui rêvait d'avoir un papy qui, comme beaucoup de papys, me racontrait ses histoires d'antan, m'emmènerait dans des endroits qu'il aime, etc. Mais c'est impossible. Papy est un bébé, une poupée. Il ne fait rien tout seul. Et cet état de fait fait que son état physique et de dépendance vis-à-vis de mamy empire de jour en jour, à chaque fois que je les revois. Ca me rend malade.
Et aller contre lui, ça ne va pas non plus, parce que depuis qu'il est avec ma mamy, il a tout ce qu'il veut, tout ce qu'il ne pouvait avoir avant. J'ai essayé une fois, d'aller contre lui *tu bois trop papy*, de lui ôter de la main la bouteille de vin dont il essayait vainement, comme hypnotisé par son objectif, avec maints tremblements quitte à tout renverser, de se servir un verre. Je l'ai jamais vu aussi enragé, ces ongles plantés dans mon bras. Enragé, Caprice. *va te faire voir, tu n'es pas mon papy*
Et pourtant, je ne devrais pas lui en vouloir. Comment en vouloir à quelqu'un qui a grandi à la place d'un autre sans être son pareil? Et qui du coup a jalonné les hopitaux psychiatriques depuis sa plus tendre enfance ! Et qui a été drogué d'antidépresseurs durant presque toute sa vie ! Et qui s'est fait régulièrement agresser par ses élèves malgré qu'il ait été un excellent prof de latin-grec mais, bien entendu sans aucune autorité, d'autant plus dans une école à majorité d'étrangers en difficulté !
Je suis en colère.
Je suis en colère car il monopolise ma grand-mère, encore très valide elle. Car son invalidité va forcément déteindre sur elle. Qu'il m'empêche de vivre les moments qu'il me reste à vivre avec elle tant qu'elle en est capable. Car, lui sans elle n'entre pas dans sa sphère des possibilités, il n'accepetera jamais d'être placé. Non, il ne le comprendra pas, il n'imagine même pas la possibilité qu'on puisse lui faire entendre ça. Peut-être même en mourrait-il. Et mamy, malgré son éternel sourire, dépérira. Et laissera derrière elle, un fils coincé qui n'aura pas donné d'enfant à sa femme (finalement, c'est peut-être mieux ainsi, sauf pour ma tante qui s'en mordra les doigts à vie de n'avoir su tenir tête à mon oncl) et une fille, ma mère, blessée et qui reportera sa blessure sur sa propre fille. Point positif de l'histoire, c'est à ma génération que l'histoire s'achève pour donner naissance à une autre. je suis un hybride un peu bizarre (je n'ai pas parlé des parents de mon père...), mais je commence à vivre avec. Et même à vivre avec les autres. Doucement, mais sûrement, et j'en suis fière. Oui, fière.
*l'impression d'avoir lâché un valise de 3 tonnes là*
Le tout sur un air de .